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Kibboutz : Caractéristiques et histoire de ces communautés

Les communautés connues sous le nom de kibboutz font partie de l’histoire d’Israël depuis plus d’un siècle.

Nous allons nous plonger dans l’histoire de ces organisations collectives pour découvrir quand elles sont apparues, pour quelle raison et quelles sont les particularités qui en font aujourd’hui un phénomène pratiquement unique dans la société.

A general view shows the Amal Stream and Kibbutz Nir David in the Beit She’an Valley in northern Israel on August 9, 2020. Photo by Menachem Lederman

Que sont les kibboutz et quelle était leur origine

Les kibboutz sont des organisations agricoles communales situées en Israël. Ils sont apparus en 1909, étant Degania le premier kibboutz situé sur le territoire actuel de ce pays, qui appartenait à l’époque à la Syrie de l’Empire ottoman. En fait, suivant les critères qui caractérisent un kibboutz, Degania correspondrait mieux à la description d’un kvutza, une communauté similaire mais de plus petites dimensions.

Cette première communauté a été créée aux mains de douze juifs d’origine russe, qui ont fui la révolution qui commençait dans ce pays. C’est ainsi que ces dix hommes et deux femmes ont fondé Degania, le premier de nombreux kibboutz. L’idée derrière ce type d’organisation était celle du sionisme socialiste développée par le penseur ukrainien Dov Ber Borojov.

En plus des idées de Borojov, le grand promoteur du sionisme ouvrier qui s’est finalement cristallisé dans le kibboutz était Aaron David Gordon. Cet idéologue a tiré son courant de pensée principalement de Léon Tolstoï. L’idée principale est que la liberté d’un peuple dépend de sa capacité à subvenir à ses besoins. Cette directive implique le contrôle de l’agriculture.

« YOUTH ALIYA » MEMBERS FROM GERMANY DANCING THE « HORA » AT KIBBUTZ EIN HAROD

Gordon percevait la nature comme une unité organique. Il préférait les liens organiques dans la société, comme ceux de la famille, de la communauté et de la nation, aux liens « mécaniques », comme ceux de l’État, du parti et de la classe. Les individus juifs étaient coupés de leur nation, vivant en diaspora, ils étaient coupés du contact direct avec la nature ; ils étaient coupés de l’expérience de la sainteté et du lien existentiel avec l’infini. Gordon a écrit :

« We are a parasitic people. We have no roots in the soil, there is no ground beneath our feet. And we are parasites not only in an economic sense, but in spirit, in thought, in poetry, in literature, and in our virtues, our ideals, our higher human aspirations. Every alien movement sweeps us along, every wind in the world carries us. We in ourselves are almost non-existent, so of course we are nothing in the eyes of other people either. »

A. D. Gordon

Pour cette raison, la base de chaque kibboutz est le travail de la terre appartenant à la ferme communale, ce que les Juifs ne pouvaient pas faire en Europe, car dans la plupart des pays les activités agricoles étaient interdites. UN D. Gordon a conclu que la création d’un état juif de son propre contrôle requis de la terre. C’est ainsi que les kibboutz ont été le début de la création de l’État d’Israël.

Il y avait aussi la situation selon laquelle la majorité des Juifs étaient engagés dans des activités du secteur des services, certains travaillaient dans l’industrie et très peu avaient des emplois liés à des activités primaires telles que l’agriculture. Borojov savait qu’il fallait inverser cette tendance pour prendre le contrôle de la terre et faire triompher la révolution socialiste. L’agriculture a donc suscité tant d’intérêt chez ces auteurs.

Principales caractéristiques du kibboutz et de ses communautés

Après avoir fait un petit tour historique de l’origine du kibboutz, nous allons maintenant nous attacher à connaître un peu mieux les principaux postulats qui ont été établis pour générer ces fermes collectives.

Collectivité

La première caractéristique que doit avoir un kibboutz est le concept de collectivité. Tout ce qui reste au sein de cette communauté appartient à tous les membres de celle-ci. À la fois leurs propres terres et leurs biens matériels jusqu’à leur propre travail et les fruits obtenus grâce à cela.

Dans un premier temps, on a essayé d’être franc avec ce précepte, mais certains conflits ont amené la règle à être légèrement assouplie pour permettre aux membres de la commune de posséder individuellement certains objets et d’avoir également une partie du salaire à usage privé, quel que soit le besoins du kibboutz.

Importance du travail du sol

Dans la section précédente, nous avions déjà vu l’importance absolue que les fondateurs du kibboutz attribuaient au travail de la terre elle-même. Ils étaient si stricts avec ce précepte que certains membres de certaines communautés ont même été expulsés parce qu’ils n’étaient pas disposés à effectuer des travaux agricoles. Au fil du temps, un certain laxisme par rapport à la norme a également été favorisé.

En fait, les kibboutz qui ont survécu à ce jour sont principalement ceux qui, le moment venu, se sont concentrés sur le développement industriel et ont ainsi obtenu un succès économique qui garantirait la viabilité de la ferme.

Effectif

Une autre des idées centrales du fonctionnement du kibboutz est que la main-d’œuvre doit provenir des membres de la communauté eux-mêmes. C’est-à-dire que les membres possèdent les moyens de production et représentent en même temps leurs travailleurs. Lorsque l’État d’Israël a été fondé, il y avait certains conflits liés au respect de cette norme.

Ce problème a été généré par l’idée que les travailleurs devaient être uniquement les membres de la ferme communale, sans possibilité pour quiconque de l’extérieur d’y accéder. Le gouvernement israélien a vu cela comme une difficulté supplémentaire pour les nouveaux citoyens de la nation à trouver un emploi qui leur permettrait de prospérer, puisque l’accès était limité aux membres du kibboutz.

Comme pour les règles précédentes, au fil du temps, il a été modifié et aujourd’hui, il est autorisé et en fait, il est courant que des travailleurs externes effectuent des tâches au sein du kibboutz en échange d’un salaire.

Égalité de rémunération

Suivant les règles établies pour les activités menées dans le kibboutz, il a été conclu qu’il était nécessaire d’établir une politique d’égalité de rémunération pour tous les membres, quel que soit le travail qu’ils effectuaient et la difficulté inhérente à celui-ci.

Cela ne veut pas dire que le salaire est exactement le même pour tout le monde, mais que chaque membre du kibboutz perçoit une compensation financière en fonction de ses besoins, notamment dans le cas d’enfants à charge. Logiquement cette politique s’applique aux travailleurs appartenant au kibboutz mais pas à ceux qui viennent de l’étranger.

Rotation des activités

Non seulement le salaire doit être égal, mais les différentes tâches de la commune doivent être assurées par tous les habitants, à tour de rôle. Par conséquent, un travail ne sera pas attribué de façon permanente à chaque individu, mais chacun changera progressivement d’activités, de sorte que tous les membres du kibboutz soient responsables de tous les travaux et qu’il n’y ait pas de postes fixes.

Un avantage de ce système est que toutes les personnes acquerront les connaissances et les compétences requises pour n’importe quel travail, de sorte qu’elles seront facilement remplaçables en cas d’indisposition ou de toute autre éventualité.

Démocratie interne

La liste des normes du kibboutz se poursuit avec un point important : il doit y avoir une démocratie interne dans la communauté. Cela implique que toute décision qui affecte le kibboutz, que ce soit légèrement ou profondément, doit être décidée par consensus entre tous les membres du groupe qui souhaitent participer à l’assemblée convoquée à cet effet.

Par conséquent, il ne sera pas obligatoire de participer à toutes les prises de décision, mais ce sera un droit de pouvoir le faire tant que le membre du kibboutz en décide ainsi.

Sécularisation

La dernière des règles qui ont été évoquées pour le bon fonctionnement de ces communautés est que le kibboutz doit être gouverné par le judaïsme culturel mais sans avoir la religion comme axe central, ce qui entraîne un processus de sécularisation. Cela signifie que les traditions et les fêtes juives dans ces fermes communales étaient plus axées sur la vie communautaire et les activités agricoles que sur la religion elle-même.

L’éducation des enfants dans un kibboutz

La naissance des premiers enfants du kibboutz a apporté une nouvelle situation qui a soulevé des questions. D’une part, il y avait la question de l’égalité des activités, il a donc été essayé que les femmes ne se déplacent pas dans un avion dans lequel leur activité principale était d’élever des enfants et, au contraire, elles pourraient continuer à effectuer toutes les tâches du ferme, comme le reste des membres.

Pour cela, la parentalité est devenue un événement partagé par tout le kibboutz. De cette façon, la génération de leur propre identité chez l’enfant a également été favorisée, au-delà des impositions de leurs parents. En effet, il a été décidé de créer des maisons communales au sein du kibboutz où les enfants vivaient ensemble, avaient des loisirs et recevaient leur éducation. Ils y dormaient même.

En charge des enfants se trouvaient des personnes ayant une formation en soins infirmiers et aussi en éducation. De cette façon, la dépendance à l’égard des soins parentaux a été éliminée et les enfants sont devenus une responsabilité partagée de toute la communauté, même économiquement, puisque leur entretien était géré par les dépenses partagées du kibboutz.

Des études ont montré que même en utilisant cette méthodologie, l’attachement que les enfants ressentaient envers leur mère ne pouvait pas être remplacé par celui d’un soignant. Ils ont également découvert des comportements égoïstes innés, comme vouloir s’approprier des jouets plutôt que de les partager, les amenant à conclure que certains comportements avaient des origines innées.

De nos jours, les règles liées à l’éducation ont également été modifiées et il est donc courant que les enfants passent beaucoup plus de temps avec leurs parents par rapport à la dynamique qui était pratiquée dans le kibboutz il y a quelques décennies.

TEL AVIV, ISRAEL – APRIL 26: A young woman wearing mask is visiting and talking from a distance with her grandmother on April 26, 2020 in Kibbutz Barkai, Israel. As a result of the coronavirus outbreak many families are not able to visit each other. There are over 15,000 reported cases of COVID-19 in the country, with over one hundred deaths. (Photo by Guy Prives/Getty Images)

Regarder vers l’avenir

Le kibboutz est une réalisation sociale et économique qui est née d’une société pionnière, a prospéré avec une économie en expansion rapide et s’est distinguée par sa contribution à l’établissement et au développement de l’État.

Le kibboutz d’aujourd’hui est l’œuvre de trois générations. Les fondateurs, motivés par de fortes convictions et une idéologie distincte, ont forgé une société avec un mode de vie communautaire unique. Leurs enfants, nés dans le cadre du kibboutz, ont travaillé dur pour consolider ses structures économiques, sociales et administratives. La génération actuelle, qui a grandi dans une société établie et prospère, applique ses énergies et ses talents pour relever les défis de la vie moderne à l’ère technologique.

Certains craignent qu’en s’adaptant aux circonstances changeantes, le kibboutz abandonne nombre de ses principes d’origine ; d’autres pensent que cette capacité d’adaptation et de compromis est la clé de sa survie. Quoi qu’il en soit, tant que le kibboutz conservera sa nature démocratique et que l’esprit de volontariat, d’engagement et d’idéalisme continuera de motiver ses membres, il disposera de ressources créatives et convaincantes pour répondre aux exigences de l’avenir.

Liens très intéressants pour compléter cet article :

The Kibbutz & Moshav: History & Overview

The Shalvi/Hyman Encyclopedia of Jewish Women

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Références :
  • Rábíń, A.Í. (2013). Growing up in the kibbutz. Springer Science + Business Media, LLC.
  • Spiro, M.E. (2017). Gender and culture: Kibbutz women revisited. Routledge. Taylor & Francis Group.
  • Tiger, L., Shepher, J. (1975). Women in the kibbutz. Harcourt Brace Jovanovich.

Article original du site Live Sensei

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