La Fabrication du consentement de Noam Chomsky et Edward Herman attire déjà par ce titre accrocheur un peu mystique. Un titre qui laisse supposer que derrière toutes les manœuvres de propagande qui se trament actuellement pour asseoir le pouvoir se cache une machine qui fabrique le consentement. Ce sont les médias qui jouent un rôle déterminant, on parle même de « quatrième pouvoir » au service de la démocratie.
Dans leur livre, Chomsky et Herman exposent leur « modèle de propagande », un authentique outil d’analyse permettant de comprendre et de décortiquer la façon du fonctionnement des médias dominants. Ils nous révèlent que ce sont des instruments d’endoctrinement qui cherchent à vulgariser la vision du monde des dominants. Ainsi, les médias feraient installer et prévaloir une forme assez spécifique de désinformation qui serait au service des élites politiques et économiques.
Pour les deux auteurs, la fabrication du consentement s’appuie sur la complicité du pouvoir et des médias. À travers leur modèle d’analyse, ils arrivent ainsi à recomposer les mécanismes permettant de montrer comme le pouvoir et l’argent arrivent à sélectionner les informations.
Tout d’abord, les médias vont tout faire pour préserver leur image d’objectivité, afin de mieux manipuler l’opinion en puisant leur information dans des sources qu’ils présentent comme très crédibles. Cette préférence a également un fondement économique : privilégier des sources présélectionnées limite les frais d’enquête, tandis qu’un travail journalistique pointilleux et appliqué couteraient beaucoup plus en temps et en argent.
En Focalisant leur enquête sur les États-Unis, par souci pragmatique aussi, les deux auteurs montrent que la Maison-Blanche ainsi que le Pentagone, entre autres constituent les épicentres de la fabrication de l’information officialisée.
Les entreprises les plus importantes sont aussi des producteurs réguliers d’informations considérer comme dignes de foi, autrement dit, ces informations méritent d’être publiées. Les sources les plus influentes exercent aussi un contrôle sur les médias en les finançant directement ou indirectement. Ainsi, cette largesse financière va permettre à l’État américain par exemple de s’approprier le privilège d’avoir un droit de regard sur la fabrication de l’information.
Pour échapper à cette manipulation, à ce « tsunami technologique », il serait temps selon Noam Chomsky « d’apprendre à interdire », de s’initier à dire non. Et pour illustrer ce qu’il avance, il donne l’exemple de la ville de San Francisco qui, en 2019, avait censuré l’identification faciale.
Cet ouvrage considéré comme un classique outre-Atlantique (paru 1988, réédité en 2002) est donc toujours d’actualité.
Alors que le Covid-19 frappe de plein fouet l’humanité, les médias essentiellement numériques ont-ils manipulé l’opinion publique pour imposer le confinement, le couvre-feu et d’autres mesures dont les passeports sanitaires ? Doit-on accepter d’être surveillé, de perdre sa vie privée ?
Aujourd’hui, et à cause de cette pandémie, la fabrication du consentement se basant sur le numérique est encore plus puissante, jusqu’à nous faire perdre toute intimité, notre cercle privé. Exploitant cette peur d’être infecté par ce coronavirus impitoyable, la surveillance est portée à son apogée s’appuyant sur l’idée au fond captieuse que la toute-puissance technologie est capable de trouver les solutions appropriées.
On est pris dans cet engrenage admirablement huilé et relativement invisible de cette fabrication du consentement qui repose sur le numérique. Et cette fabrique est encore plus puissante car elle possède des fers de lance puissants, à savoir le divertissement et la connectivité.
Ce dispositif informatique arrive donc à manipuler les esprits, jusqu’à accepter d’être traqué. Or, aucune application informatique ne pourrait se substituer aux masques, aux produits désinfectants, aux tests PCR, aux médecins ou aux infirmiers de qualité… Et même si ces éléments font défaut, que cela ne soit pas un prétexte pour traquer des personnes contaminées ou non par le coronavirus ou pour filer les déplacements des confinés en créant en parallèle des passeports sanitaires. Si le confinement fut accepté de bonne foi mais dans la douleur, c’est parce que cette machine de fabrication du consentement a bien fonctionné. Mais ce sont les plus puissants qui en ont profité.
Article original du site Live Sensei