Les pays africains ont travaillé dur pour améliorer l’accès des enfants à l’éducation de base, mais il reste encore beaucoup à faire. Aujourd’hui, 32,6 millions d’enfants en âge d’aller à l’école primaire et 25,7 millions d’adolescents ne vont pas à l’école en Afrique subsaharienne. La qualité de l’éducation reste également un problème important, mais il est possible que la technologie fasse partie de la solution. La révolution numérique actuellement en cours dans la région a conduit à un boom des essais utilisant les technologies de l’information et de la communication (TIC) dans l’éducation – à la fois en classe et en dehors.
Une étude menée par l’Agence Française de Développement (AFD), l’Agence Universitaire de la Francophonie (AUF), Orange et l’Unesco montre que les TIC dans l’éducation en général, et l’apprentissage mobile en particulier, offrent un certain nombre d’avantages possibles. Ceux-ci incluent l’accès à des ressources pédagogiques à faible coût, une valeur ajoutée par rapport à l’enseignement traditionnel et une solution complémentaire pour la formation des enseignants.
Cela signifie qu’il existe un énorme potentiel pour atteindre les exclus des systèmes éducatifs. La qualité des connaissances et des compétences enseignées peut également être améliorée.
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L’irrésistible révolution numérique
L’accès aux moyens de communication fait désormais partie intégrante de la vie quotidienne de la grande majorité des personnes vivant en Afrique. Les prix des téléphones portables et le coût des communications ont baissé. L’utilisation du téléphone mobile est passée de 5 % en 2003 à 73 % en 2014. Le continent compte 650 millions de propriétaires de téléphones mobiles (plus que les États-Unis et l’Europe réunis) et les réseaux mobiles 3G se développent rapidement.
Les coûts baissent et les zones rurales seront bientôt accessibles grâce à de nombreux aménagements. Il s’agit notamment des câbles sous-marins reliant l’Afrique à d’autres continents, des câbles à fibres optiques qui assurent la connectivité à l’intérieur du continent et des plans de connexion par satellite récents. L’accès à l’Internet filaire reste faible avec 11% des foyers connectés. Mais l’accès à l’Internet mobile aide déjà la région à rattraper son retard. Le taux de pénétration des smartphones devrait atteindre 20 % en 2017.
Cette expansion rapide des services Internet mobiles contribue déjà au développement économique et social de la région. C’est particulièrement le cas dans des domaines tels que l’inclusion financière (banque mobile), la santé (santé mobile) et la productivité des agriculteurs.
Compte tenu des fonctionnalités des téléphones mobiles (appels vocaux, SMS) et des smartphones (lecture de textes et de documents, MP3, images et vidéo) et de leur large disponibilité, leur potentiel d’amélioration de l’accès et de la qualité des services éducatifs est également illimité.
Le M-learning (ou m-education) – services éducatifs via un appareil mobile connecté – est le principal levier de croissance des technologies de l’information et de la communication éducatives et de mise à disposition de contenus. Cela peut être pour l’apprentissage (formation des enseignants, pédagogie centrée sur l’apprenant, tests) ou pour pallier le manque de données pour la gestion du système éducatif.
Les nouvelles technologies pour l’apprentissage
Les technologies de communication de masse sont utilisées comme moteur principal de l’éducation en Afrique depuis les années 1960. Des pays comme la Côte d’Ivoire, le Niger et le Sénégal ont développé de grands programmes utilisant la radio puis la télévision pour promouvoir l’éducation de base, améliorer la formation des enseignants et même enseigner directement aux élèves. Ces programmes ont touché un grand nombre d’élèves à un coût relativement faible. Mais les résultats en termes de performances scolaires restent difficiles à évaluer.
La grande distribution de matériel informatique a ensuite pris le relais dans les années 1990. De nombreux programmes nationaux et internationaux ont commencé à se concentrer sur l’équipement des écoles en ordinateurs pour faciliter l’éducation numérique et offrir de nouveaux supports pédagogiques sous forme de logiciels éducatifs et de CD-ROM. L’usage était principalement centré sur les écoles. Mais les essais ont souvent été lancés sans objectifs pédagogiques clairs et sans cadres politiques définis par l’État.
L’arrivée des ordinateurs personnels dans les années 2000 a facilité l’individualisation des TIC scolaires. Le projet américain One Laptop per Child, lancé dans plusieurs pays africains en 2005, visait à équiper les écoles d’ordinateurs portables à faible coût.
Près de 2 millions d’enseignants et d’élèves sont impliqués dans ce programme à travers le monde. Plus de 2,4 millions d’ordinateurs (pour un coût d’environ 200 $, plateforme d’enseignement ouverte comprise) ont été livrés. Les évaluations montrent que l’utilisation d’ordinateurs portables ou fixes en classe n’a qu’un effet limité sur les performances scolaires des élèves. Mais cela peut avoir un impact positif sur certaines capacités cognitives si les élèves peuvent utiliser leurs ordinateurs à la maison le soir.
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Contenus et utilisations
Depuis 2010, la diffusion à grande échelle de la technologie des communications mobiles a transformé les pratiques avec un accès plus facile aux ressources pédagogiques à l’intérieur et à l’extérieur de l’école. L’arrivée des smartphones et tablettes à bas prix et à faible consommation permet aux TIC dans l’éducation de sortir progressivement du milieu scolaire.
On est passé d’une approche basée sur des outils à une approche centrée sur le contenu et l’utilisation. Ces outils mobiles, en particulier les tablettes, offrent des opportunités importantes pour remédier au manque de livres et de manuels scolaires. La distribution de lecteurs de type Kindle à 600 000 enfants dans neuf pays africains a eu un impact considérable sur la lecture et sur les résultats des élèves aux tests pédagogiques.
Il a également été démontré que l’envoi de messages texte contenant des leçons courtes, des tests à choix multiples ou des enregistrements audio a un effet important sur les enseignants. C’est également le cas des MOOC (cours en ligne ouverts et massifs) adaptés aux besoins et capacités des pays africains.
La fertilisation croisée des modèles et des outils pédagogiques a élargi le potentiel des technologies de l’information et de la communication dans l’éducation. Certaines technologies, perçues comme dépassées, connaissent un renouveau partiel grâce à la combinaison de supports utilisables dans un même projet. Par exemple, les programmes de radio et de télévision sont peu coûteux et attirent un public considérable. Associés à Internet et aux téléphones portables, ils offrent des résultats pédagogiques prometteurs.
Le programme d’enseignement de l’anglais Janala de la BBC pour le peuple du Bangladesh est un bon exemple de coopération entre des acteurs très divers.
Quelles sont les conditions de réussite ?
La plupart des pays africains montrent un intérêt pour la technologie dans l’éducation. Mais un certain nombre de conditions doivent être réunies pour garantir leur déploiement efficace dans le paysage éducatif. Ceci comprend:
Répondre aux contraintes techniques et économiques
Répondre aux besoins des utilisateurs et renforcer leurs capacités
Trouver des modèles de financement durables
Faciliter une collaboration multipartite efficace.
Bien que le temps de l’innovation et de l’expérimentation ne s’arrête jamais, le moment est venu de mettre en place des systèmes et des stratégies pour passer au niveau supérieur, notamment en mettant en place des coalitions d’acteurs. Les TIC ne résoudront pas tous les problèmes d’éducation en Afrique. Mais cela peut aider à changer fondamentalement le paradigme actuel des systèmes de développement des compétences.
Article original du site Live Sensei